Tout va bien, chers voisins
par Pierre Dac junior
Ouf!
Nous voici rassurés.
Je viens d’entendre à la radio que l’Etat français avait prononcé une interdiction administrative de sortie du territoire et une confiscation provisoire de passeport pour six apprentis-djihadistes français qui voulaient se rendre en Syrie.
D’ailleurs, il est précisé qu’on leur a remis un récépissé, en attendant l’expiration du délai de six mois au terme duquel ils pourront reprendre possession du passeport, bien sûr en échange du récépissé (modèle Fr.Dj.346-88) dûment émargé et tamponné.
Grâce à la vigilance des autorités françaises, les djihadistes resteront donc en France.
Ils ne commettront aucune exaction en Syrie.
En France, c’est moins sûr, puisque tous les coupables d’attentats des dernières années étaient eux-aussi bien connus de la police.
Cela laisse donc des perspectives encourageantes à ces six personnes.
Rétrospectivement, on se dit que si les frères Kouachi et le dénommé Coulibaly avaient pris l’avion pour la Syrie, ils auraient certainement commis des attentats sur place.
Heureusement, cela a été évité…
Quelqu’un a hasardé la remarque suivante: « ne vaudrait-il pas mieux les empêcher de revenir plutôt que les empêcher d’y aller? »
Ce à quoi un fonctionnaire français spécialement formé pour ces questions a répondu: « s’ils ne peuvent pas y aller, ils ne peuvent pas non plus en revenir ».
C’est tout à fait indéniable.
A propos : en même temps que cette annonce qui nous emplit d’espoir, nous apprenons que pour la énième fois, après avoir survolé des centrales nucléaires, divers drones ont observé de nuit la capitale, et notamment des bâtiments d’intérêt stratégique tels que l’Elysée ou l’Ambassade des Etats-Unis. Selon Libération du 24 février 2015 :
« Mardi, les autorités étaient plutôt discrètes, renvoyant vers le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), qui dépend de Matignon. Le ministère de la Défense précisait néanmoins «poursuivre son travail avec les industriels sur les capacités de détection». Avec la multiplication des survols d’installations sensibles, le SGDSN a en effet lancé un chantier «sur la protection contre les actes de malveillance de drones aériens». Le plan s’articule autour de trois axes. La place Beauvau récupère le volet juridique et la coordination des forces (armée de l’air, gendarmerie, police). «L’évaluation des risques et menaces» incombe au ministère de l’Ecologie. Et le ministère de la Défense pilote la réponse «opérationnelle» pour déterminer quelles technologies de détection et de brouillage peuvent être employées. »
Avec une constatation aussi franche de l’incapacité de réagir des autorité publiques, et un partage aussi complexe des responsabilités destiné à émietter la question entre divers ministères, on aura compris que la sécurité aérienne ne se déclenchera, on le suppose, qu’à condition de voir apparaître dans le ciel parisien des Tupolev Tu-95, des Chengdu J-20 ou des B-58 Hustler.
Enfin, dernier point, toutes les personnes ayant participé ces dernières années à des attentats terroristes, jusqu’au chauffeur de Mme Coulibachy, étaient bien connues de la police. A l’époque où la théorie officielle s’énonce en termes de « décèlement précoce » (ou de l’intelligence led-policing), ce bien étrange contraste avec la réalité engendre un certain nombre de questions, que nous abandonnons à la discrétion du lecteur.
Pour autant, ces remarques de notre part ne visent pas à demander qu’on accentue l’équipement de notre pays en soldatesque diverse. Il s’agirait plutôt de réaliser que lorsqu’un appareil d’Etat se montre déficient sur un certain nombre de sujets réels et sérieux, comme ceux qui précèdent, il se montre d’autant plus enclin à monter des baudruches (du genre Tarnac) et à « sévir » à propos de personnes faussement incriminées, ou ayant commis des « délits » qui ne sont autres que des actes politiques dont la tradition est déjà longue. Ici comme ailleurs, les faux sujets doivent éclipser les vrais.
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