Correspondance avec Clément Homs – suite

 

Comme déjà signalé par une note finale du 24 septembre 2015 (http://www.lesamisdenemesis.com/?p=1420), Clément Homs avait repris en septembre 2015 notre discussion autour de l’origine de la valeur.
Comme il vient de publier sur le site Palim-psao le contenu des deux lettres qu’il nous a adressées (Première lettre : http://www.palim-psao.fr/2015/12/discussion-autour-du-caractere-historique-de-la-valeur-et-sur-la-naissance-du-capitalisme-correspondance-clement-homs-jean-pierre-ba, seconde lettre : http://www.palim-psao.fr/2015/12/discussion-autour-du-caractere-historique-de-la-valeur-du-travail-et-de-l-argent-sur-la-naissance-du-capitalisme-correspondance-clem), voici son mail du 19 septembre 2015 qui nous les adressait, ainsi que le nôtre du 22 septembre 2015, annonçant la poursuite de cette discussion.

 

Cher Jean-Pierre,
Désolé encore pour ce courrier tardif au-delà de ce que je pensais pouvoir te promettre, tu n’y croyais peut-être plus. Plein de choses familiales pas très sympathiques me sont tombées dessus cet été.
Comme tu t’en apercevras, j’ai parfois trouvé dans notre discussion des entrées qui ne concernaient pas à strictement parler tes propres développements, mais qu’il m’intéressait d’aborder au travers de quelques remarques (des aspects méthodologiques, des commentaires sur W. Benjamin, W. Pietz, etc.). En 2 courriers distincts (PJ), mais dont l’un est la suite immédiate de l’autre, j’ai essayé de poursuivre les points suivants qui me semblent être au cÅ“ur de notre discussion :
– Dans le labyrinthe des rétroprojections
– Quelle « ouverture anthropologique » ?
– La naturalisation de l’économique : sur la distinction problématique entre économie et capitalisme
– Quelques remarques sur l’analogie entre la religion et le capitalisme
– Brève présentation du thème « Kurz et la différence entre religion et capitalisme »
Des fois je résume peut-être de manière erronée certains de tes développements et tu me corrigeras au besoin si j’ai mal compris.
Prenons le temps dans nos échanges, dans ce débat chacune de nos hypothèses sont des questions très complexes.
Je t’indique par ailleurs qu’en octobre Anselm fera paraitre sa confrontation avec Latouche sur ces questions de naissance du capitalisme, dans Pour en finir avec l’économie. Décroissance et critique de la valeur, dont je te mets également la plaquette en PJ.
Amitiés
Clément

 

Cher Clément,
Merci de tes deux courriels.
C’est plutôt une brochure qu’une lettre que tu m’as adressée, mais la complexité du sujet, comme tu écris, implique de prendre son temps et de développer chaque sujet, tu as bien raison. Je ferai de même.
Je n’ai pour l’instant que survolé une partie de ces pages mais je confirme volontiers mon intérêt pour les thèmes que tu t’es proposé de traiter, et mon soutien pour le choix que tu en as fait. Ta tentative d’aller au fond des choses est la bienvenue et mérite que ton interlocuteur fasse de même.
Hélas je reprends également à mon compte la nécessité de prendre son temps.
Je vais sans doute être replongé dans un surcroît de travail à partir de début octobre mais la bonne nouvelle, c’est que je serai débarrassé de tout labeur fin mars, une fois pour toutes. Dans l’immédiat, ma réponse risque donc d’être au moins aussi espacée que la tienne. Mais je ferai de mon mieux pour ne pas forcément réaliser une prophétie aussi pessimiste! Un délai suffisant me permettra aussi de « rattraper » quelques lectures, et d’y ajouter celle du livre que tu m’annonces.
La complexité des thèmes m’était tout à fait consciente lors de la rédaction du bouquin que je leur ai consacré. Ainsi, le livre commençait-il par les remarques suivantes:
« Ce qui suit n’est pas une théorie patiemment murie, formant un tout en elle-même: voilà ce qu’il faut d’emblée avouer au lecteur. Il ne s’agit que de simples prémisses. »
De même, il finissait par le constat suivant:
« La perception de tout ce qui participe de l’aliénation dominante doit être renforcée jusqu’à ce qu’elle devienne un réflexe. La théorie critique ne peut remplacer une transformation radicale de la société, elle ne peut ni ne doit rêver de commander à celle-ci, mais elle peut sans doute lui venir en aide pour qu’elle trouve son propre chemin et pour qu’elle se dissocie plus facilement du camp adverse. En réussissant cela, elle aura rempli sa fonction. »
Bref, comme tu peux voir, je ne m’imaginais pas faire davantage que de donner quelques coups de pioches dans cet enchevêtrement, histoire d’entamer le chantier, et, d’autre part, de rendre étranger au lecteur ce qui lui paraît familier dans les pratiques économiques contemporaines (de sorte que le Bekanntes se rapproche de l’Erkanntes, tu connais certainement ce jeu de mot de Hegel) de façon à lui faire mesurer subjectivement, par ce biais, l’étendue de l’aliénation omniprésente. C’est d’ailleurs à cet objectif que l’on doit probablement une certaine exagération dans les rapprochements entre l’ancien et le moderne, mais c’était voulu et c’est probablement dans mon caractère, pas très scolaire, de ne pas vouloir me priver d’interpeler la subjectivité du lecteur. Je ne voulais pas simplement qu’il comprenne, mais aussi qu’il s’interroge et qu’il ressente.
Je te promets donc de revenir vers toi dès que possible.
Amitiés,
Jean-Pierre

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