La chasse aux sorcières est ouverte
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Ils lisent et, pire encore, ils écrivent des livres subversifs ! Très louche. Ils n’ont pas de téléphone portable : un scandale ! Ils n’aiment pas l’argent ? Des détraqués. Ils répandent la bonne humeur dans un village ? De très dangereux personnages.
Nous venons de vivre en France un mini onze septembre. Notre Mohammed Atta à nous n’a certes pas abandonné son passeport à côté d’une voie de TGV avant de commettre l’irréparable, mais il était placé depuis des mois sous surveillance rapprochée par la DST, ce qui probablement devrait suffire à prouver son crime. Etait-il encore sous surveillance au moment où, juché sur les épaules de sa frêle compagne, il accrochait des crochets en métal à une ligne de tension de 25.000 volts sans en ressentir les effets ? A moins qu’en rusé dialecticien, il ne surveillait ses surveillants, attendant traîtreusement leur pause déjeuner pour agir ? Toujours est-il (détail traité dans les communiqués avec beaucoup de tact et de discrétion) que la Surveillance du Territoire n’a pas pu l’empêcher de passer à l’acte, ni même immortaliser en photo ce flagrant délit. A tout le moins, sitôt qu’il eût perpétré son acte de sabotage sur des lignes TGV, les agents de la DST étaient-ils en mesure d’extraire sa fiche personnelle XS217.BT822c de leur pochette surprise, et de montrer sa tête à une population en état de choc. Etat de choc qui va de soi, quand on sait qu’il n’y a eu aucune victime, et qu’il ne pouvait même y en avoir. Bien pire : ces horribles crochets étaient de nature à faire ce que la SNCF sait très bien faire toute seule : empêcher la circulation d’un train.
Cela faisait des mois, semble-t-il, qu’on suivait ces jeunes gens. Et qu’il ne se passait rien dans ce foutu pays, mais vraiment rien du tout, qu’on aurait pu mettre à leur charge pour enfin les coffrer. La crise financière ? Pas évident de convaincre les jurés. Le dérèglement climatique ? Même chose. La morosité des Français ? La mévente du CD de Carla Bruni ? La baisse des ventes d’automobiles ? L’augmentation du chômage ? Le renflouement arbitraire d’établissements bancaires en voie de faillite ? Non, à vrai dire, tous ces vrais malheurs qui accablent le pays ne faisaient pas l’affaire. Force était de se reporter sur autre chose, même anecdotique, même imaginaire.
On a répété à l’envi que ces sabotages ne provenaient pas d’employés de la SNCF : mais pourquoi une telle frénésie de dénégations ? Y aurait-il anguille sous roche ? Comment faire en effet pour qu’on ne parle plus d’une telle hypothèse, qui serait de nature à nuire gravement au climat social ? Mais très simplement : en arrêtant d’autres coupables. Une seule chose est sûre : ceux qui ont effectivement commis les sabotages, que ce soit spontanément ou sur instruction d’instances haut placées, tolèrent qu’on enferme des innocents, et ne réclament pas qu’on les relâche.
C’est comme si on avait voulu organiser un festival destiné à fêter le départ de la Maison Blanche de George W. Bush. En effet, Michèle Alliot-Marie, une sorte de croisement entre Arlette Chabot et Sarah Palin (la première pour la capacité de séduction, la seconde pour l’intelligence), nous assène une définition du terrorisme aussi convaincante que l’était la recherche d’armes de destruction massive en Irak. Avant même qu’ils ne soient jugés, elle sait que ces faux paysans sont des terroristes (on pourrait d’ailleurs, grâce à cette présomption de culpabilité, économiser les dépenses liées au procès, et les pendre tout de suite). Place Beauvau, où l’on redéfinit la logique avec beaucoup de spontanéité, on décide que les fameux crochets en métal sont constitutifs d’un acte de terrorisme, quoi qu’en disent les textes juridiques d’une époque révolue (qu’on appelait la Cinquième République) : dans l’Etat virtuel qui a commencé avec l’accession au pouvoir de Nicolas 1er, est terroriste un acte qui ne peut en aucune façon faire la moindre victime, qui donc n’inspire de crainte à personne, et qui de ce fait ne peut exercer aucune pression sur les autorités du pays. Il fallait simplement y penser, et se rappeler le critère de vérité des « responsables politiques » les plus postmodernes : « on peut toujours essayer. » Ce n’est pas la Presse qui les contredira, trop heureuse d’appliquer quotidiennement les mêmes méthodes.
Voici donc les Français embarqués dans une nouvelle guerre de libération : celle menée par une armée de plusieurs milliers de croisés de l’ordre, cagoulés et héliportés, armés de fusils mitrailleurs à visée laser, guidés par satellite géostationnaire dans leur progression à travers des champs de betteraves, contre une demi-douzaine de criminels, généralement armés d’une pince à linge ou d’un ouvre-boîte, et communiquant par un instrument très sophistiqué et impossible à capter de loin : la bouche humaine.
Cet organe buccal, pourra-t-il aussi servir à autre chose ? Les Français se prêteront-ils une fois de plus à avaler n’importe quoi ? Il fut un temps où ils sabordaient d’anciens régimes, raccourcissaient leur roi, et furent célébrés pour cela dans le monde entier. Mais de telles motifs ne signifient rien pour une Ministre de l’Intérieur, ou pour un Président de la République : ceux-ci n’ont la France plein la bouche que parce qu’en allant loger dans leurs Palais, ils ont cessé de faire partie de la population. La place de la France dans le monde ? Ce pays ne la retrouvera qu’en montrant une fois de plus qu’il sait rejeter la tyrannie.
Au moins, cette histoire aura-t-elle eu deux aspects bénéfiques : elle aura montré qu’il existe encore des concitoyens qui ne se laissent pas entraîner par des balivernes médiatiques, notamment la population de Tarnac, village d’irréductibles mécréants refusant de croire sur commande ; et elle aura également assuré au petit livre intelligent et bien écrit qu’est L’insurrection qui vient une publicité au-delà de toute attente.
Elle aura aussi montré toute la veulerie dont est capable la racaille de gauche, en l’occurrence les têtes de beauf PS, PC et Verts qu’on peut admirer sur le site du Conseil Régional du Limousin, racaille entendant enfoncer l’épicerie de Tarnac en gelant ses subventions (voir communiqué ci-dessous). Quelle est l’espèce zoologique qui prévaut sur le plateau des Millevaches ? En vérité, nous l’ignorons. Mais au Conseil Régional du Limousin, il est clair que l’espèce la plus répandue, tellement répandue qu’elle y est à l’origine d’un authentique déséquilibre écologique, ne peut être qu’une variété de charognards génétiquement rongés par l’impatience et ne pouvant même pas attendre que la victime ait cessé de bouger.
Mais nous devons faire confiance à ceux qu’on vient d’incarcérer sans jugement : nul doute qu’ils ont toutes les qualités requises pour donner à cette affaire, une fois libérés, toute la publicité qu’elle mérite.
Le 3 décembre 2008
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La région du Limousin coupe les vivres à l’épicerie de Tarnac
La petite épicerie de Tarnac (Corrèze) a vu ses subventions gelées. La commission permanente du conseil régional du Limousin, réunie le 21 novembre, a décidé à l’unanimité de ses 28 membres d’ajourner la demande d’aide à la création d’entreprise faite par « le magasin général » de Tarnac, d’un montant de 4 000 euros. Cette décision fait suite à l’initiative d’un élu du Modem, Jean-Jacques Belezy, arguant que le dossier avait été présenté par des « personnes mises en cause dans l’affaire du sabotage des lignes TGV ». L’un des trois gérants, Benjamin R., fait partie des personnes interpellées le 11 novembre et incarcérées. L’épicerie avait obtenu une première subvention de 1 000 euros le 26 juin. Des élus locaux du plateau des Millevaches s’émeuvent du gel de ce dossier.
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